L’essentiel est-il essentiel ?

Publié le par Cader Reip

Essai philosophico-ménager de notre chercheur en animalerie appliquée

 

L’essentiel est-il essentiel ? Voila une question que l’on devrait se poser plus souvent. En effet le futile n’est-il pas plus essentiel que l’essentiel et inversement ? Prenons l’exemple du pot de chambre, objet considéré comme éminemment essentiel pendant des siècles. Et bien le pot de chambre est devenu, depuis l’invention du filet à papillon, beaucoup plus futile qu’essentiel. En effet le pot de chambre dans sa version originelle permettait un nombre relativement limité d’usages au terme desquels une vidange de l’instrument devenait nécessaire. Or le filet à papillon lui, permet un nombre illimité d’usages et ne nécessite aucune vidange à aucun moment de son utilisation. Certes les dégâts collatéraux – comme l’on dit maintenant – de son usage intensif ne sont pas insignifiants mais les moquettes sont de nos jours très perfectionnées et peuvent être lavées et relavées des milliers de fois avant que leur utilité ne trépasse. Ainsi l’invention de deux nouveaux instruments – la moquette nettoyable et le filet à papillon – ont-ils remisé au placard de la futilité un objet jusqu’alors essentiel. Mais prenons un autre exemple encore pour illustrer notre théorie de la versatilité de l’essentiel : le stylo à encre blanche. Cet outil indispensable à tout agent secret de la guerre froide est aujourd’hui dénué de tout intérêt et complètement passé de mode alors même qu’il ne serait jamais venu à l’idée d’un quelconque 00 de la planète de partir à la recherche d’un agent triple sans cet indispensable instrument de communication codée. Aujourd’hui, après l’invention du texto, le stylo à encre blanche a, si j’ose dire, rendu l’âme. En effet l’utilisation de ce nouvel outil de transmission d’information qu’est le texto permet à tout un chacun d’inventer son propre code sans avoir recours pour le décoder à une inutile bougie permettant, par transparence, de déchiffrer le message inscrit sur un papier blanc.

Vous objecterez – incrédules que vous êtes -  qu’il semble inutile de décoder un message écrit dans notre belle et vielle langue. Certes, mais c’est alors que vous n’avez jamais reçu ni envoyer un texto ! Car le texto ne s’écrit pas, il s’éructe ! j t vu yer ché ninou yavé d super gato onoi, jané mangé 8 j mal au q. é toi ? Et de même manière qu’il ne s’écrit pas il ne se lit pas non plus, il s’avale ! jtévuyerchéninouyavédsupergatoonoijanémangé8jmalauqétoi ? Double voire triple avantage sur l’encre blanche : plus besoin de savoir écrire, plus besoin de savoir lire, et plus besoin de produits chimiques perfectionnés pour transférer un message et le passer à l’ouest ! Le texto a supplanté l’encre blanche comme le filet à papillon le pot de chambre. Vous faut-il encore un exemple ? Et bien tiens, prenons le « petit cabanon au fond du jardin où l’on peut lire le journal de l’an dernier tout en vaquant à des occupations hygiéniques ». Supplanté lui aussi. Et par qui ? Par l’invention de du produit jumelé « récepteur internet – chaise percée ». Louis Croivébaton, son célèbre inventeur, récipiendaire du non moins fameux prix du tricycle à deux roues, a ainsi, non sans une certaine nostalgie, participé à rendre futile voire inutile un objet jusqu’alors considéré comme hautement essentiel. Et les exemples sont légion (étrangers et nationaux mais les nationaux sont moins étranges alors que les étrangers sont généralement internationaux) et je ne vais pas vous faire l’injure de penser que vous n’avez pas vous-même réalisé depuis des lustres (voire des plafonniers entiers) cet étonnant concept de la versatilité de l’essentiel. CQFD.

Publié dans Réflexions

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